La Banque de France publie des enquêtes de conjoncture : un diagnostic sur l’économie française, sous la forme d’indicateurs de climat des affaires et de prévisions à court terme. L’Enquête Mensuelle de Conjoncture, chaque début de mois, décrit la situation conjoncturelle du mois précédent et prévoit le PIB trimestriel, grâce aux réponses de 10 000 dirigeants d’entreprise.
Selon les chefs d’entreprise participant à notre enquête (environ 8 500 entreprises ou établissements interrogés entre le 26 avril et le 4 mai), l’activité a progressé en avril dans l’industrie, les services et le bâtiment. Pour mai, les entreprises anticipent une stabilisation de l’activité dans les services et un repli dans l’industrie et le bâtiment. Ces anticipations pourraient cependant refléter au moins pour partie l’effet d’un volume de congés plus élevé qu’habituellement au cours de ce mois de mai.
Les difficultés d’approvisionnement continuent à s’atténuer dans le bâtiment (17 % des entreprises les mentionnent en avril, après 19 % en mars) et dans l’industrie, où 28 % des chefs d’entreprise les mentionnent (après 30 % en mars). Surtout, pour la première fois depuis l’été 2020, les industriels jugent que les prix sont en baisse pour les matières premières et se stabilisent pour les produits finis. Les difficultés de recrutement reculent un peu mais concernent environ la moitié des entreprises (51 %).
Notre indicateur d’incertitude diminue légèrement dans les trois grands secteurs par rapport au mois précédent, il reste à des niveaux encore élevés par rapport à ceux qui prévalaient avant 2020. La situation de trésorerie évolue peu dans l’industrie et s’améliore dans les services.
Concernant les conséquences de la crise énergétique, l’opinion remontée par les chefs d’entreprise s’améliore significativement : 25 % d’entre eux indiquent un impact sur leur activité au cours des trois prochains mois (après 29 % en mars et 31 % en janvier).
Sur la base des résultats de l’enquête, complétés par d’autres indicateurs, nous estimons que la progression du PIB au deuxième trimestre 2023 serait légèrement positive par rapport au trimestre précédent.
1. En avril, l’activité continue de progresser dans l’industrie, les services et le bâtiment
En avril, l’activité progresse dans l’industrie, à un rythme conforme aux anticipations formulées par les chefs d’entreprise au cours du mois dernier. Les soldes d’opinion indiquent une hausse de la production dans la majorité des secteurs. Cette progression est particulièrement vive dans la chimie et la pharmacie, ainsi que dans l’aéronautique et la fabrication de produits informatiques, électroniques et optiques. Dans l’automobile et le caoutchouc-plastique, la production se contracte légèrement.
Les stocks de produits finis progressent en avril. Ils sont jugés au-dessus de leur moyenne de long terme, notamment dans les produits informatiques, électroniques et optiques, les équipements électriques, la chimie et l’automobile. Dans la pharmacie, en revanche, les industriels estiment que leurs stocks demeurent significativement plus faibles que de coutume.
Dans les services marchands, l’activité progresse à un rythme toujours soutenu. Cette évolution concerne plus particulièrement la réparation automobile, l’édition, l’hébergement, les activités de loisirs et de services à la personne. À l’inverse, l’activité se contracte fortement dans l’intérim, ainsi que dans le transport et entreposage.
L’activité progresse peu dans le bâtiment : elle demeure plus dynamique dans le second œuvre que ne le prévoyaient les chefs d’entreprise le mois dernier ; elle fléchit en revanche significativement dans le gros œuvre, conformément aux anticipations des entrepreneurs.
L’opinion sur la situation de trésorerie évolue peu dans l’industrie, et demeure à un niveau inférieur à sa moyenne de long terme. Elle se redresse dans les services en avril, tout particulièrement dans la restauration, les services techniques et les activités de publicité et d’études de marché.
2. En mai, selon les anticipations des entreprises, l’activité se replierait dans l’industrie et le bâtiment et se stabiliserait dans les services
Pour le mois de mai, dans l’industrie, et pour la première fois depuis l’été dernier, les chefs d’entreprises anticipent un recul de l’activité dans la majorité des secteurs, qui pourrait en partie résulter ce mois-ci de volumes de congés plus importants qu’habituellement des salariés de ce secteur (même une fois corrigé de l’effet du nombre de jours ouvrables et des variations saisonnières). Les baisses d’activité sont notamment attendues dans la métallurgie, ainsi que dans le caoutchouc-plastique et les équipements électriques. À l’inverse, dans les produits informatiques, électroniques et optiques, l’activité resterait favorablement orientée.
Dans les services, l’activité progresserait peu, sous l’effet de dynamiques sectorielles contrastées. Ainsi, dans la réparation automobile, le transport et entreposage, et l’intérim, les chefs d’entreprise tablent sur une décrue de l’activité. Dans les autres secteurs, les dirigeants s’attendent à une progression de l’activité, notamment dans l’hôtellerie-restauration ainsi que dans la location automobile, le conseil en gestion et l’édition.
Enfin, dans le bâtiment, les chefs d’entreprise anticipent un repli de l’activité dans le gros œuvre comme dans le second œuvre.
Notre indicateur mensuel d’incertitude, construit à partir d’une analyse textuelle des commentaires des entreprises interrogées, diminue légèrement en avril. Il reste toutefois supérieur à son niveau moyen pré-Covid.
L’opinion sur la situation des carnets de commande dans l’industrie diminue et se situe en dessous de sa moyenne sur quinze ans, avec cependant une forte polarisation entre les secteurs dont les carnets de commandes sont jugés bien garnis (automobile, aéronautique, électronique, informatique et optique, métallurgie) et ceux dont les carnets de commandes sont jugés bas (agro-alimentaire, chimie, bois-papier-imprimerie, caoutchouc-plastique). Dans le bâtiment, les carnets de commande se regarnissent légèrement pour le deuxième mois consécutif, grâce à un regain de commandes dans le second œuvre.
3. Les difficultés d’approvisionnement continuent de s’atténuer ; le rythme de hausse des prix ralentit fortement dans l’industrie et le bâtiment
En avril, les difficultés d’approvisionnement continuent de diminuer dans l’industrie (28 %, après 30 % en mars) et dans le bâtiment (17 %, après 19 %).
Pour la première fois depuis l’été 2020, le solde d’opinions sur les prix des matières premières est devenu négatif dans l’industrie. Quant à celui concernant les prix des produits finis, il a fortement chuté, signalant pour ce mois-ci le retour sur un rythme de progression des prix comparable à la période pré-Covid. Dans le bâtiment, les prix ralentissent là aussi vivement, la concurrence s’intensifiant dans un contexte d’anticipation d’une baisse de l’activité. Dans les services, le ralentissement des prix est plus graduel.
De façon plus détaillée, 13 % des chefs d’entreprise déclarent avoir augmenté leurs prix de vente dans l’industrie ce mois-ci (contre 49 % un an plus tôt en avril 2022). Cette proportion est la plus basse pour un mois d’avril depuis 2019 (2020 excepté). Dans l’agro-alimentaire, elle atteint 19 % (contre 53 % en avril 2022), soit un niveau proche des anticipations formulées par les chefs d’entreprise au cours du mois dernier (14 %). Dans le bâtiment, 23 % des entreprises ont augmenté leurs prix ce mois-ci (65 % en avril 2022). Dans les services, la proportion tombe à 19 %, contre 29 % en avril 2022. Les perspectives pour mai suggèrent globalement une nouvelle détente dans l’industrie (9 %), les services marchands (12 %), et le bâtiment (19 %).
Les chefs d’entreprise ont également été interrogés sur leurs difficultés de recrutement. Celles-ci reculent légèrement en avril et concernent 51 % des entreprises interrogées dans l’ensemble des secteurs.
4. Nos estimations suggèrent une légère hausse du PIB au deuxième trimestre
Dans notre précédente publication de conjoncture, parue le 11 avril 2023, nous avions correctement anticipé l’évolution de l’activité au premier trimestre, les comptes trimestriels, publiés par l’Insee fin avril, ayant indiqué une évolution de + 0,2 % du PIB. Malgré un repli dans le secteur de la construction, l’activité a été résiliente lors de ce trimestre passé, notamment dans l’industrie, tirée à la hausse par la composante énergie, les services marchands étant, eux, restés stable par rapport au quatrième trimestre 2022.
Pour le mois d’avril, l’utilisation des informations de l’enquête à un niveau de désagrégation fin, ainsi que d’autres données disponibles, nous amènent à estimer que le PIB progresserait par rapport à mars, qui avait enregistré un creux mensuel. Cela s’explique surtout par un redressement de l’activité dans l’industrie et dans les services marchands, avec un effet rebond particulièrement marqué dans les secteurs touchés par les grèves au mois de mars, en particulier les secteurs des services de transports et de l’énergie.
Dans le détail, d’après les données de l’enquête, la valeur ajoutée serait en hausse dans l’industrie manufacturière et stable dans l’industrie agro-alimentaire. La branche énergie (non couverte par l’enquête) serait le principal moteur du dynamisme de la valeur ajoutée dans l’industrie, rebondissant après un mois de mars dégradé. La valeur ajoutée dans les services couverts par l’enquête progresserait aussi en avril, à la fois dans les services aux ménages, l’hébergement-restauration et les services aux entreprises. La construction, enfin, progresserait légèrement en avril.
Les données à haute fréquence que nous suivons à titre de complément pour les secteurs de services non ou seulement partiellement couverts par l’enquête, pointent vers une légère baisse de la valeur ajoutée dans les secteurs du commerce alors qu’un net rebond serait observé dans les services de transports (en particulier ceux affectés par les mouvements sociaux).
Les anticipations des entreprises pour mai semblent globalement indiquer un dynamisme limité du PIB par rapport à avril, avec de nouveau des contrastes suivant les secteurs et un degré d’incertitude encore assez fort.
Sur l’ensemble du deuxième trimestre 2023, nous estimons que le PIB serait en légère hausse par rapport au trimestre précédent.
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Mise à jour le 4 Décembre 2023