Corrélation positive entre les reprises et le financement obligataire
La substitution de la dette obligataire aux prêts bancaires qui s’opère en période de reprise semble témoigner de la difficulté des banques à satisfaire la demande de crédit des entreprises (voir Becker et Ivashina, 2014). L’accès aux marchés obligataires comme source alternative de financement permettrait d’augmenter les investissements et d’accélérer ainsi la reprise. Dans Grjebine et al. (2017) nous mettons en évidence l’existence d’un lien entre la structure de la dette des entreprises et la vigueur de la reprise. Le graphique 1 présente l’évolution du PIB réel après un pic d’activité, selon que la valeur initiale de la part du financement obligataire est élevée (supérieure à la moyenne, trait plein) ou faible (inférieure à la moyenne, trait pointillé). Au début de la récession, l’évolution est similaire : sur les trois premiers trimestres, les deux courbes sont très proches. Par la suite, les deux courbes divergent.
La reprise commence plus tôt dans les pays où la part du financement obligataire est élevée — en moyenne trois trimestres après le pic, contre six trimestres dans les économies à faible part obligataire — puis l’écart s’accentue. Les économies où la part du financement obligataire est élevée retrouvent leur niveau de PIB d’avant la récession cinq trimestres après le pic, alors que les économies où cette part est faible ne le retrouvent que onze trimestres après le pic. À cette date, le PIB réel des économies où la part du financement obligataire est élevée dépasse de 5 % sa valeur au moment du pic. La relation positive entre la dynamique de reprise et le niveau de la part obligataire initiale existe indépendamment de la nature, financière ou pas, de la crise. Elle est maintenue quand on exclut les États-Unis et la récession de 2008 de l’échantillon. La structure de la dette a également un effet propre quand on prend en compte l’effet de la taille des entreprises, le développement des marchés financiers et la qualité des institutions.
Vers la diversification des sources de financement dans l’UE ?
Ces analyses sont de nature à soutenir le projet d’Union des Marchés des Capitaux (UMC) visant à approfondir et à intégrer davantage les marchés des capitaux dans les 28 États membres de l’UE. L’une des priorités affichées par la Commission est de réduire la dépendance au crédit bancaire pour assurer le financement de la croissance, en faisant par exemple baisser la taille critique à partir de laquelle les entreprises pourraient avoir accès au financement obligataire, un mode de financement aujourd’hui réservé aux plus grandes entreprises en Europe. La diversification des instruments d’endettement permettrait une meilleure allocation du capital et mobiliserait davantage d'investissements, en appui à d’autres initiatives de l’UMC, telles que le renforcement du financement sur fonds propres et du soutien aux fonds de capital-risque.