Afrique-France

Coopérations monétaires Afrique-France : rapport 2020

Mise en ligne le 27 Octobre 2021

Dans son nouveau format adapté en 2020 pour prendre en compte la réforme des accords entre la France et l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), le rapport des coopérations monétaires Afrique-France continue d’assurer un suivi économique et financier de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC), de l’UEMOA et de l’Union des Comores. Outre les chapitres habituels consacrés à ces trois régions pour l’année 2020 et le début de 2021, ce rapport inclut désormais un panorama de la situation en Afrique. Le chapitre « Enjeux et défis » comprend cette année trois articles. Le premier traite de la situation sanitaire et des conséquences socio-économiques de la pandémie ; le deuxième et le troisième de l’impact du changement climatique respectivement sur la conduite de la politique monétaire et les flux migratoires en Afrique.

Depuis le début de la pandémie de Covid-19, l’Afrique est dans l’ensemble moins touchée, et l’est plus tardivement que les autres continents, mais le nombre de nouveaux cas hebdomadaires par million d’habitants continue d’augmenter, passant de 7 à 54 entre mars et septembre 2021, contre 1143 en Europe en septembre (d’après l’Organisation mondiale de la santé – OMS). En miroir de cette situation sanitaire relativement moins inquiétante, la vaccination est faible, faute de vaccins disponibles et de financement. Selon l’OMS, à fin septembre 2021, 6,6 % de la population africaine a reçu au moins une dose de vaccin et seulement un tiers des pays du continent ont vacciné totalement 10 % de leur population. Au sein de l’espace des coopérations monétaires Afrique-France (CMAF), à la même date, 20 % de la population des Comores et 15 % de celle de Guinée équatoriale ont reçu au moins une première dose de vaccin. En revanche, dans les autres pays de la CEMAC et de l’UEMOA, le taux de primo-vaccination est inférieur. À titre d’exemple, ce taux se situe à 4,4 % en Côte d’Ivoire et à 1,4% au Cameroun (cf. chapitre Enjeux et défis, article « Situation sanitaire et conséquences socio-économiques de la crise en Afrique »).

Autre enjeu toujours d’actualité, celui de l’insécurité : elle demeure préoccupante sur le continent, alimentée par des troubles et des menaces à la fois politiques (contentieux électoraux, coups d’État), intercommunautaires (rébellions sécessionnistes, attaques de groupes armés) et terroristes (au Sahel, dans la région du lac Tchad, au Mozambique, en Somalie, etc.).

Comme la plupart des pays d’Afrique subsaharienne (ASS), les pays de l’UEMOA et de la CEMAC, et l’Union des Comores, ont fait face à un fort ralentissement économique en 2020, en lien avec la pandémie

À l’échelle de l’espace CMAF, la croissance du PIB réel s’est effondrée en 2020, à 0,4 % – après 4,3 % en 2019 –, très en deçà de la croissance démographique. Toutefois, cette baisse (– 4,2 points de pourcentage – pp – en UEMOA et – 3,8 pp en CEMAC) est moins importante que celle de la croissance mondiale (– 5,9 pp). Les Comores et l’UEMOA ont même maintenu un taux de croissance positif (respectivement 0,2 % et 1,5 %). Ces chiffres masquent cependant une chute historique du PIB par tête.

 

Taux de croissance du PIB (en %)
Sources : BCEAO, BEAC, BCC, FMI et calculs Banque de France pour les agrégations CMAF et des pays exportateurs et importateurs de pétrole, fondées sur les PIB respectifs des pays.
  2017 2018 2019 2020
Monde 3,8 3,6 2,8 -3,1
Afrique subsaharienne 3,0 3,3 3,1 -1,7
- Pays exportateurs de pétrole 0,5 1,2 1,8 -2,5
- Pays exportateurs de pétrole 4,7 4,5 3,9 -1,2
Coopérations monétaires Afrique-France (CMAF) 4,2 4,6 4,3 0,4
- CEMAC 0,7 1,8 2,1 -1,7
- UEMOA 6,5 6,4 5,7 1,5
- Union des Comores 3,8 3,8 2,0 0,2

 

Les pays les plus diversifiés ont mieux résisté à ce ralentissement économique

En CEMAC, la récession, très liée à la chute des prix du pétrole en 2020, a frappé durement les quatre pays qui dépendent des exportations de pétrole (Congo, Gabon, Guinée équatoriale et Tchad), alors que la croissance économique du Cameroun, pays plus diversifié, a pu rester modeste (+ 0,7 %). Le même phénomène s’est produit en UEMOA, quoique dans une moindre mesure. Le Sénégal, par exemple, dont l’économie est relativement diversifiée, a mieux résisté à la crise que d’autres pays (son taux de croissance du PIB a baissé de 2,9 pp, à 1,5 %).

L’UEMOA et la CEMAC ont affiché un déficit courant en nette aggravation à fin 2020

Dans l’UEMOA, la balance des biens s’est sensiblement dégradée sous l’effet d’une forte diminution des principales exportations (baisse du volume de production de cacao et baisse des exportations de pétrole en valeur, en raison de l’effet prix). Le déficit courant a atteint 5,6 % du PIB, contre 4,9 % en 2019. En CEMAC, le déficit courant de 4,8 % du PIB, contre 3,5 % en 2019, résulte principalement de l’effondrement des exportations d’hydrocarbures en valeur. À contrario, le déficit courant des Comores a diminué, de 3,3 % du PIB en 2019 à 2,0 % en 2020, grâce aux importants transferts de la diaspora, qui ont permis d’accroître l’excédent des revenus.

 

Solde des transactions courantes, dons inclus (en % du PIB)
Sources : BCEAO, BEAC, BCC, FMI et calculs Banque de France pour l’agrégation CMAF, fondée sur les PIB respectifs des pays.
  2017 2018 2019 2020
Afrique subsaharienne -2,1 -2,4 -3,4 -3,0
Coopérations monétaires Afrique-France -3,7 -4,2 -4,4 -5,3
- CEMAC -1,5 -2,1 -3,5 -4,8
- UEMOA -5,2 -5,5 -4,9 -5,6
- Union des Comores -2,1 -2,9 -3,3 -2,0

 

Sans franchir la limite communautaire de 3 %, l’inflation a toutefois dépassé les 2 % en UEMOA (2,1 %) et en CEMAC (2,4 %)

La crise sanitaire et les mesures prises dans le monde pour la contenir ont perturbé les chaînes d’approvisionnement locales et mondiales, engendrant une hausse des prix des produits alimentaires, parfois amplifiée par les comportements spéculatifs de certains distributeurs. Plus classiquement, certains prix ont augmenté à cause de la moindre abondance des récoltes (céréales en UEMOA) ou de l’augmentation des prix des intrants agricoles (CEMAC). Aux Comores, au contraire, l’inflation est passée de 3,7 % en 2019 (année du cyclone Kenneth) à 0,9 % en 2020. Comparés aux autres pays de l’ASS, les pays des CMAF ont résisté aux pressions inflationnistes, notamment grâce à l’ancrage de leur monnaie à l’euro, alors que l’inflation est revenue à deux chiffres, en moyenne, en ASS.

 

Inflation (moyenne annuelle, en %)
Sources : BCEAO, BEAC, BCC, FMI et calculs Banque de France pour l’agrégation CMAF, fondée sur les PIB respectifs des pays.
  2017 2018 2019 2020
Monde 3,2 3,6 3,5 3,2
Afrique subsaharienne 10,6 8,3 8,2 10,3
Coopérations monétaires Afrique-France

1,0

1,6 0,3 2,2
- CERMAC 0,9 2,3 2,0 2,4
- UEMOA 1,1 1,2 -0,7 2,1
- Union des Comores 1,0 1,7 3,7 0,9

 

L’année 2020 a été marquée par des mesures exceptionnelles d’assouplissement monétaire par les trois banques centrales, y compris des mesures de politique monétaire non conventionnelles

La Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) et la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) ont mis en œuvre à la fois des mesures conventionnelles (baisse des taux d’intérêt) et des mesures plus innovantes. La BCEAO a élargi les possibilités de refinancement des banques, en assurant la cotation de 1 700 entreprises privées dont les effets n’étaient, jusqu’alors, pas admis en collatéral de ses injections de liquidités. Elle a également favorisé l’émission de bons du Trésor dénommés « bons Covid-19 » en ouvrant un guichet spécial de refinancement pour ces titres. Cette orientation accommodante s’est prolongée en 2021 avec notamment la mise en circulation de bons de relance, dotés de modalités de refinancement favorables. La BEAC a quant à elle assoupli les conditions d’éligibilité des garanties aux opérations de refinancement et a mis en place un programme d’achat de titres publics sur le marché secondaire, mesures prolongées respectivement jusqu’aux 30 juin et 31 août 2021.

La Banque centrale des Comores (BCC) a également rapidement agi en soutien à l’économie, en abaissant le coefficient des réserves obligatoires afin de limiter les tensions sur la trésorerie des banques. Le taux minimum sur les crédits bancaires a lui aussi été abaissé.

Comme ailleurs dans le monde, la gestion budgétaire des conséquences de la pandémie a conduit à une dégradation importante de la situation des finances publiques

La mise en œuvre de mesures contracycliques de soutien aux économies s’est traduite par une augmentation des dépenses publiques d’environ 3 % du PIB en CEMAC et 5 % en UEMOA, les pays de cette dernière région bénéficiant de marges budgétaires plus importantes. À l’échelle régionale, le déficit budgétaire de l’UEMOA est ainsi passé de 2,3 % du PIB en 2019 à 5,7 % en 2020, tandis que celui de la CEMAC a lui aussi augmenté, de 0,1 % du PIB en 2019 à 2,0 % en 2020. La hausse des dons aux Comores a permis de dégager un excédent budgétaire de 0,3 % du PIB. Le déficit budgétaire des pays des CMAF est cependant resté moins dégradé que celui de la moyenne des pays de l’ASS, d’après le FMI.

Dans ce contexte, la dette des États s’est fortement alourdie en 2020, compromettant dans certains cas sa soutenabilité. L’endettement public total a atteint 50,5 % du PIB en UEMOA et 53,3 % en CEMAC (contre respectivement 43,4 % et 49,1 % en 2019), avec une forte hétérogénéité entre pays (cf. chapitres 3 et 4, sur l’UEMOA et sur la CEMAC respectivement, pour les détails des analyses de soutenabilité de la dette du FMI).

 

Solde budgétaire dons inclus / PIB (en % du PIB)
Sources : BCEAO, BEAC, BCC, FMI et calculs Banque de France pour l’agrégation CMAF, fondée sur les PIB respectifs des pays.
  2017 2018 2019 2020
Afrique subsaharienne -4,4 -3,5 -3,9 -6,6
Coopérations monétaires Afrique-France -3,6 -2,1 -1,5 -4,3
- CEMAC -3,7 -0,2 -0,1 -2,0
- UEMOA -3,5 -3,3 -2,3 -5,7
- Union des Comores -0,2 -0,4 -2,5 0,3

 

Ratio dette publique / PIB (en %)
Sources : BCEAO, BEAC, BCC, FMI et calculs Banque de France pour l’agrégation CMAF, fondée sur les PIB respectifs des pays.
  2017 2018 2019 2020
Afrique subsaharienne 44,6 47,5 50,4 57,2
Coopérations monétaires Afrique-France 44,2 44,6 45,5 51,4
- CEMAC 54,2 50,8 49,1 53,3
- UEMOA 37,9 40,8 43,4 50,5
- Union des Comores 19,3 19,2 25,7 26,5

 

L’assouplissement des règles prudentielles a permis au secteur bancaire de traverser la crise, sans toutefois remédier à ses insuffisances structurelles

Afin de préserver la fonction d’intermédiation financière des banques, les superviseurs ont assoupli leur réglementation. En UEMOA, les banques ont été invitées à accorder des reports d’échéance de leurs prêts aux entreprises et aux ménages. Cette disposition a été assortie d’un assouplissement de certaines exigences comptables et prudentielles, ainsi que d’un prolongement d’un an de la période transitoire de mise en œuvre de la nouvelle réglementation prudentielle de l’Union (réglementation conforme à Bâle III). En CEMAC, la Commission bancaire a allégé certaines procédures réglementaires ainsi que les conditions de reclassement des créances en souffrance restructurées ou rééchelonnées en encours sains. Elle a également allongé le délai de déclassement en créances douteuses et abaissé le volant de conservation des fonds propres.

Sous l’effet de ces assouplissements, en UEMOA les indicateurs de rentabilité et de qualité des portefeuilles de crédit se sont améliorés. En CEMAC, si la situation des banques a été préservée – taux de rentabilité et résultats en hausse –, les faiblesses qui caractérisaient cette zone avant la crise sanitaire demeurent, en particulier le poids préoccupant des créances en souffrance. Dans les deux zones, l’exposition des établissements aux États a augmenté et des infractions à la réglementation prudentielle subsistent.

La santé du secteur bancaire comorien s’est dégradée en 2020. Les établissements rencontrant des difficultés structurelles n’ont pas pu mettre en œuvre toutes les actions correctrices nécessaires, et les autres ont fait face à un fort ralentissement de leurs activités.

 

Taux de créances brutes en souffrance (en %)
Sources : BCEAO, BEAC et BCC.
  2018 2019 2020
CEMAC 21,2 21,1 21,2
UEMOA 12,5 11,8 10,9
Union des Comores 24,0 21,0 22,0

 

Le soutien aux économies des pays des CMAF a aussi pris la forme d’un appui financier exceptionnel de la part de leurs partenaires, notamment multilatéraux

La plupart des pays ont fait face à une partie de leurs besoins urgents de liquidité en sollicitant le FMI, qui a répondu rapidement par l’octroi de facilités d’urgence (facilités de crédit rapide et instruments de financement rapide), pour un montant total de 2197,9 millions de dollars en 2020.

Quatre pays de la CEMAC et sept de l’UEMOA, ainsi que les Comores, ont de plus bénéficié de l’Initiative de suspension du service de la dette (ISSD), lancée par le G20 et le Club de Paris en avril 2020 et renouvelée deux fois jusqu’à fin 2021. Pour la période allant de mai 2020 à décembre 2021, d’après les estimations de la Banque mondiale au 10 septembre 2021, cela représente un potentiel d’économies pour les 12 pays concernés de 2,8 milliards de dollars.

En novembre 2020, le G20 a adopté un cadre commun de restructuration des dettes (common framework for debt treatments beyond the Debt Service Suspension Initiative), visant à répondre aux enjeux structurels de soutenabilité des dettes dans les pays à faible revenu. Le Tchad, un des trois pays ayant formulé une requête dans ce cadre, devrait être le premier à en bénéficier.

Enfin, de nombreux pays ont perçu des financements du fonds fiduciaire d’assistance et de riposte aux catastrophes mis en place par le FMI : la Centrafrique et le Tchad en CEMAC, tous les pays de l’UEMOA à l’exception de la Côte d’Ivoire et du Sénégal, ainsi que l’Union des Comores.

Si un rebond modéré de l’activité est anticipé en 2021, quatre grands défis de long terme persistent

Les perspectives économiques pour 2021 demeurent incertaines. La tendance générale devrait être à la reprise, sous réserve d’une amélioration des conditions sanitaires. Ainsi, la BCEAO prévoit une croissance du PIB de 5,6 % dans l’UEMOA, avec un effet de rattrapage plus marqué dans les pays les plus affectés en 2020 (notamment ceux ayant subi la baisse des prix du pétrole). La BEAC anticipe un léger rebond de la croissance de la CEMAC, à 1,3 % (croissance toutefois très inférieure à la croissance démographique), grâce à des effets favorables internes et externes (regain de la demande mondiale, forte reprise des prix du pétrole), mais à condition que tous les pays bénéficient d’un accord avec le FMI. Aux Comores, le PIB devrait croître de 1,5 %, un rythme inférieur à la croissance démographique.

Les tensions inflationnistes se maintiendraient en 2021, avec un taux d’inflation de 2,0 % en UEMOA et de 2,7 % en CEMAC selon les banques centrales de ces deux régions, sous l’effet combiné du regain de l’inflation mondiale et des hausses des prix du pétrole, des matières premières – notamment agricoles –, ainsi que des coûts du transport maritime. L’inflation se situerait à un niveau inférieur aux Comores, autour de 1%.

La crise a eu de graves répercussions en matière de développement, sur la santé, la pauvreté et sur l’éducation notamment, qui risquent de se faire ressentir pendant plusieurs années. Le PIB par habitant de l’ASS a reculé de 4,2 % en 2020, ce qui correspond à un retour au niveau de 2013. Si la baisse du PIB par habitant a été moindre en UEMOA (– 1,6 %), elle a été plus sévère en CEMAC (– 8,2 %). En outre, d’après l’Unicef, l’apprentissage scolaire s’est interrompu en 2020 pour de nombreux enfants africains et jusqu’à 15 % d’entre eux pourraient ne jamais retourner à l’école après la crise. D’après les calculs de l’Unesco pour l’UEMOA, les écoles ont été totalement ou partiellement fermées pendant 17 semaines en moyenne. En CEMAC, les fermetures d’écoles ont été plus longues encore, de 28 semaines en moyenne. Dans ce contexte, le retard accusé par le continent pour atteindre les Objectifs de développement durable (ODD), fixés par les Nations unies à horizon 2030, devrait s’accroître. Certains progrès accomplis sont remis en cause, notamment ceux qui concernent les objectifs 1 (« pas de pauvreté »), 2 (« faim zéro »), 3 (« bonne santé et bien-être »), 4 (« éducation de qualité ») et 8 (« travail décent et croissance économique »). Les enjeux de développement seront donc au premier plan dans les prochaines années, ne serait-ce que pour permettre un retour au niveau d’avant-crise et combler le retard pris sur les ODD.

L’enjeu de l’adaptation au changement climatique sera vital pour l’Afrique, tant eu égard aux risques liés à la transition vers des économies bas-carbone qu’à ceux qui sont liés aux dommages matériels et financiers immédiats. La publication du rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), le 9 août 2021, a été l’occasion de rappeler qu’il s’agit du continent le plus sévèrement touché par les risques physiques, alors même qu’il n’est responsable que de 4 % des émissions de CO2. Les principaux indicateurs de vulnérabilité au changement climatique (indice ND-GAIN, indicateur de vulnérabilité de la Ferdi) placent l’Afrique parmi les régions les plus vulnérables et les moins préparées au changement climatique. Au sein du groupe des pays les moins développés, les neuf pays les plus vulnérables selon l’indicateur de la Ferdi se situent en Afrique, dont trois dans les pays de l’espace CMAF (Niger, Tchad et Mali). Dans cet espace, plusieurs épisodes climatiques extrêmes sont survenus ces dernières années : inondations en Côte d’Ivoire et au Cameroun en 2020, sécheresse récurrente au Mali, cyclone Kenneth aux Comores en 2019, etc. Les conséquences de cette aggravation du climat sont multiples : conséquences économiques, migratoires (cf. chapitre Enjeux et défis, article « Vulnérabilité au réchauffement climatique en Afrique et flux migratoires »), impact sur le développement. Les dépenses nécessaires à l’adaptation climatique et à la prévention des catastrophes naturelles sont considérables. À cet égard, les initiatives des banques centrales comme celles des États sont à encourager (cf. article « Politique monétaire et verdissement de l’économie : quels enjeux pour l’Afrique? »), à l’image de celle du Bénin, qui a réalisé, en juillet 2021, une émission inédite en Afrique d’une euro-obligation dédiée au financement de projets à fort impact pour atteindre les ODD des Nations unies.

L’Afrique devra aussi relever le défi de la gouvernance. Selon les dernières données de la Fondation Mo Ibrahim, l’indice Ibrahim de la gouvernance en Afrique a reculé en 2019 et ce recul s’est très vraisemblablement poursuivi en 2020 en raison, pour partie, des conséquences directes de la pandémie. La sécurité, l’État de droit, la démocratie et l’inclusion se sont dégradés, en lien avec la situation sécuritaire. Bien que, selon la Fondation, la gouvernance se soit améliorée dans les pays côtiers de l’UEMOA, elle reste préoccupante au Sahel et dans les pays de la CEMAC. Les résultats, pour les pays des CMAF, de la dernière évaluation par la Banque mondiale des politiques et des institutions nationales pour l’Afrique (Country policy and institutional assessment – CPIA 2020) sont contrastés pour l’année 2019 : dans le classement du groupe « gouvernance », le Sénégal et la Côte d’Ivoire sont en tête des CMAF, que devancent toutefois le Cap-Vert, le Rwanda et le Ghana. Des progrès ont été enregistrés par le Bénin en matière de droit de propriété, par la Côte d’Ivoire en matière de transparence et de corruption, par le Togo pour la mobilisation des recettes, par la Côte d’Ivoire, le Mali, le Togo et le Congo, enfin, dans le domaine de la gestion financière et budgétaire. Mais plusieurs reculs ont aussi été constatés, s’agissant notamment de la qualité de l’administration publique (Burkina Faso, Comores) et de la gestion financière et budgétaire (Tchad).

Sur le plan économique, la garantie d’une croissance durable et inclusive en Afrique, et dans les pays de l’espace CMAF en particulier, passera par un renforcement de l’intégration. Cette dernière doit permettre de remédier aux obstacles que constituent, d’une part, des marchés étroits et parfois enclavés et, d’autre part, une insertion difficile dans les chaînes de valeur mondiales. L’intégration régionale en UEMOA et en CEMAC s’est poursuivie, en particulier dans les domaines sanitaire et climatique, mais la convergence économique des pays a reculé (convergence des niveaux de vie mesurée par le PIB/habitant, convergence commerciale mesurée par la part du commerce intracommunautaire dans le commerce total, convergence financière mesurée par la part des transactions entre pays, etc.). Le manque d’infrastructures – routières notamment – et d’harmonisation des règles d’origine, ainsi que l’insécurité, constituent des obstacles puissants aux échanges. Si dans ces deux unions économiques et monétaires l’intégration se renforce progressivement, elle reste en devenir, malgré les progrès institutionnels au niveau des ensembles plus larges, dans la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC), notamment, a fortiori au niveau continental. Enfin, le démantèlement tarifaire au sein de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) a officiellement débuté le 1er janvier 2021. Si les pays de la ZLECAf se sont fixé des objectifs ambitieux d’élimination de la quasi-totalité des droits de douane en dix ans, certains tardent à communiquer les listes des produits qu’ils souhaitent exclure de la libéralisation, ralentissant ainsi le processus.

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